« […] Albert, à l’épicerie, il se servait gratis. Loulou supportait tout de lui… elle payait cash, au jour le jour, les gâteries du dernier homme de sa vie. A première vue on peut trouver ça sordide… au fond, c’est de la pure sagesse ! Passé l’âge des clairs de lune et des serments, il faut se hâter de grappiller le plaisir… encore un petit coup de bite, monsieur le bourreau !... A donner ou prendre, selon ! Tatahouine, s’il avait pu, il l’aurait bien tronchée aussi la mémée. Seulement, lui, il se rapprochait un peu trop de son âge… ils étaient contemporains. Pour la bagatelle, c’est pas l’idéal… au fur et à mesure qu’on avance vers la boîte à dominos… on s’en ressent pour la jeunesse, on veut lui inculquer ce qui nous reste d’expérience… les habiletés du trou du cul. Tout le tragique est là… Roméo chauve édenté, lutinant, poussant une Juliette cacochyme dans une petite carriole à Nanterre. Les sentiments, il leur faut de l’enveloppe de chair fraîche… les bandaisons, les pâmoisons, ça supporte mal la bouteille. »
Alphonse Boudard, Les combattants du petit bonheur, La Table Ronde, 1977.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire