“ Si l’on n’avait pas appris l’art cruel de faire des miroirs, et que les femmes dussent passer leur vie au bord des rivières, chacun de nous ne verrait vieillir que les autres… ”
“ La civilisation assouplit, polit les instincts et les énergies dont elle n’utilise que la force vive, pour ses fins obscures… Mais n’accumule-t-elle pas artificiellement des éléments qu’elle déforme en les comprimant, et dont la déflagration multipliera, dans une circonstance donnée, la redoutable puissance inerte ? ”
“ Ainsi vont les réformes sociales qui sont de pauvres chevaux à qui tout fait peur, et dont les conducteurs sont toujours endormis… Elles partent, un beau soir, ardentes, fringantes… Le moindre incident de route leur fait rebrousser chemin… et elles reviennent, le matin, au point d’où elles étaient parties. ”
“ Il est bien évident que, neuf fois sur dix, l’homme est entièrement responsable de l’écrasement du chien. Le chien est-il parvenu à se mettre en sûreté d’un côté de la route, que, bien vite, l’homme l’appelle, comme si, d’être près de l’homme, cela suffisait à tout, pour le chien… L’homme l’appelle avec une autorité impérieuse, glapissante, comme on voit les mères appeler leurs enfants, dans les rues, juste pour qu’ils se précipitent sous les véhicules. Merveilleux instinct de l’amour maternel des mères, accouplé à leur sottise ! Le chien, qui se plaît aux caresses plus qu’un homme, et aux coups, mieux qu’une femme, accourt à l’appel. Peut-être a-t-il vu le danger ? Il n’importe. Il accourt, puisqu’il est fidèle, et, en accourant, il se fait écraser. Naturellement. D’ailleurs, que peut-il arriver d’autre, lorsqu’on se dévoue à un homme, à une femme, à un principe, au lieu de suivre sa vie, et au point de leur sacrifier, comme le chien, ses idées, ses goûts, sa personnalité ? "
” Les mâles, eux, ne vivent que d’amour et de guerre. Ils sont soudards, criards, ridicules, prétentieux, dégoûtants, comme toutes les bêtes… à femmes. Se battant quand ils ne font pas l’amour, faisant l’amour quand ils ne se battent pas, combien en avons-nous écrasés, en cette double posture !… Comme Wallenstein, qui « avait cela de commun avec les lions », dit Schiller, j’ai horreur du cri du coq. Dès le matin, ils claironnent une chanson monotone et stupide qui me réveille et qui m’irrite… S’ils n’étaient pas si bien mis – avec trop d’éclat, pourtant – ah ! comme on les détesterait ! Les Gaulois, bavards, vantards, paillards, pillards, braillards, guerriers et militaristes, ne pouvaient mieux choisir leur emblème. “
” Plus je vais dans la vie, et plus je vois clairement que chacun est l’ennemi de chacun. Un même farouche désir luit dans les yeux de deux êtres qui se rencontrent : le désir de se supprimer. Notre optimisme aura beau inventer des lois de justice sociale et d’amour humain, les républiques auront beau succéder aux monarchies, les anarchies remplacer les républiques, tant qu’il y aura des êtres vivants, tant qu’il y aura des hommes sur la terre, la loi du meurtre dominera parmi leurs sociétés, comme elle domine parmi la nature. C’est la seule qui puisse satisfaire les convoitises, départager les intérêts… “
” Aux cris de la sirène, les hommes sortent de leurs maisons, quittent leurs champs, s’assemblent, me maudissent, me montrent le poing, brandissent des faux et des fourches, me jettent des pierres. Depuis Jésus, c’est toujours la même histoire. On se dévoue, pour les hommes… Et ils vous lapident, la veulerie des temps ne permettant plus qu’ils vous crucifient ! “
" Même dans leurs moments d’exaltation, ils ne se livrent jamais, et toujours ils se mentent. N’est-ce donc point là le parfait amour ? ”
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