lundi 13 mai 2019

Moi je devais traduire...

« Voilà des années que j’ai envie d’écrire un journal. J’en ai commencé un au moment de la Libération. Je ne l’ai jamais retrouvé ; si je le publie, je suis perdu de réputation. Pendant que Paris se libérait lui-même, j’étais agrafé à Villeparisis par trois Boches qui voulaient absolument baiser. Ils en pleuraient : « Ach Paris ! » Ils y avaient été tellement heureux qu’ils voulaient tirer leur dernier coup avant de partir.
 Je les avais rencontrés dans un bistrot et je les avais ramenés au sana de Villevaudé, dans leur camion, parce que j’étais fatigué. Ils n’ont jamais voulu partir, d’ailleurs. J’ai fait trois prisonniers, en somme. (A ne pas avouer, parce qu’il aurait mieux valu pour eux qu’ils foncent jusqu’en Allemagne pour se planquer.)
  On arrive dans un café, ils voulaient la petite, ils étalaient l’argent, 1000, 2000 francs. La mère était scandalisée. A la fin, ils se concertent, reviennent, montrent la mère et disent : « Tant pis, on couchera avec la vieille ! » Moi je devais traduire. […]»

Albert Paraz, Le gala des vaches, 1948, Editions L’Age d’Homme.

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