dimanche 28 juillet 2019

Bientôt dans les bacs...

Réédition du livre de Mark SaFranko précédemment édité chez feue 13e Note Edition...

13e Note (2009)
La Dragonne (2019)




















New York, milieu des années 70. Les rencontres se font au piano-bar. Entre Max Zajack, apprenti-écrivain abonné aux petits boulots et Olivia, brune énigmatique et sensuelle, c'est le coup de foudre. Ils se jettent à corps perdu dans une relation torride. Mais ces débuts idylliques vont prendre une tournure inattendue : Olivia, éternelle insatisfaite, s'avère peu à peu incontrôlable, au grand dam de Max, lui-même victime de ses démons intérieurs. Les voilà consumés par le feu d'une passion toxique et addictive, sur fond de sexualité exacerbée. Pourront-ils sortir indemnes de cette spirale infernale ? Voilà enfin réédité, assorti d'une nouvelle traduction, l'un des romans phares de Mark SaFranko. Issu de la scène indépendante new-yorkaise, dans le sillage des Fante, Miller et autre Bukowski auxquels il a souvent été comparé, cet infatigable puncheur nous livre avec "Putain d'Olivia" une histoire fiévreuse et déglinguée comme il en a le secret.
Bien plus qu’une histoire d’amour, une fascination destructrice. Ensemble, Max Zajack et la sulfureuse Olivia vont tout connaître: le sexe, les jobs sans envergure, les espoirs déçus, au rythme d’une dégringolade tragique et burlesque, qui s’achèvera en rupture brutale. Pour Max, l’apaisement sera au bout de ce voyage de lumière et de ténèbres mêlées.
Mark SaFranko sort de nulle part. Un homme sans limites ni frontières... Mark SaFranko n’est plus un ovni littéraire que seuls quelques initiés savaient localiser. Sa prose nerveuse et racée, sa littérature du corps à corps a trouvé son public. Un auteur est né.
Signes particuliers : un goût immodéré pour la prise de risques, une prose nerveuse et racée. Une écriture au corps à corps dans la lignée d'un Fante, d'un Miller, d'un Bukowski. SaFranko puise ses histoires aux profondeurs de sa propre existence et c'est une manière efficace de donner du punch à sa prose et quelques uppercuts à ses lecteurs. Chambres de meublés pourris, jobs sans envergure, histoire d'amour et substances toxiques. Larmes amères et sexe pour Max Zajack, le héros, amoureux fou d'Olivia Aphrodite Tanga, beauté énigmatique et "putain" plus ou moins affirmée qui l'entraîne dans l'abîme d'une passion addictive, d'une fascination destructrice. Max avance sur un chemin sombre. Au bout, il trouvera l'apaisement. Départ immédiat pour un voyage de lumière et de ténèbres mêlées...
Mark SaFranko est un tenace. Il a survécu à des compagnes perturbées, des menaces de mort, une santé mentale fragile et des dizaines de boulots (chauffeur, livreur, astrologue, OS, fast-food). Cette vie d'errance nourrit une oeuvre vaste : nouvelles en quantités, poèmes, essais, romans, pièces de théâtre et quelque 150 chansons. Car l'homme est un écrivain compulsif, un marathonien du verbe dont Dan Fante dit qu'il "aime mieux écrire que respirer". Un auteur, un vrai.


En bref, de la loose à la sauce Bukowski/John Fante/Dan Fante...

Putain d'Olivia, Mark SaFranko, Editions La Dragonne, Sortie le 11 Septembre 2019.

mercredi 24 juillet 2019

D'un enterrement l'autre...


Quand André Gide est mort, en 1951, le seul journaliste disponible à «France-Soir» était un spécialiste du fait divers, d'ailleurs excellent. On l'expédia rue Vaneau. Il ne rappela que le soir: «Aucun intérêt, c'est une mort naturelle.» C'est sans doute pour éviter un tel malentendu que, pour l'enterrement de Céline, comme j'étais catalogué littéraire, c'est moi qui fus envoyé.

Céline est mort le samedi 1er juillet 1961. Ses voisins ne l'ont su que lorsqu'ils ont vu apporter son cercueil. Lucette Almanzor aurait voulu un enterrement le plus intime possible, sans journalistes. Mais il a dû y avoir une fuite. Je pense que Roger Nimier a prévenu Pierre Lazareff. Bref, avec mon ami André Halphen, de «Paris-Presse», nous n'étions que deux reporters.

Je revois le Bas-Meudon, sous une petite pluie, tôt le matin. Sortant de la villa Maïtou, pavillon vieillot, 23 ter route des Gardes, descendant le jardin banlieusard pour rejoindre le corbillard, le cercueil était suivi d'un tout petit nombre de personnes: la fille de Céline, née d'un premier mariage, Roger Nimier, Marcel Aymé, Claude Gallimard, Max Revol, Jean-Roger Caussimon et la comédienne Renée Cosima, qui était la femme de Gwenn-Aël Bolloré. J'ai reconnu aussi Lucien Rebatet. En novembre 1946, j'avais assisté au procès de «Je suis partout» et je l'avais vu condamner à mort.

Suivi de quelques voitures, le corbillard entama la montée, à travers les rues de Meudon, vers le cimetière des Longs-Réages. Il continuait à pleuvoir. Le convoi n'est pas passé par l'église, et il n'y a pas eu de discours. A peine au cimetière, le cercueil a été glissé dans la fosse. Quelques fleurs et c'en fut fini à jamais du docteur Destouches, alias Louis-Ferdinand Céline, dont la vie fut si longtemps pleine de bruit et de fureur. Il était à peine 9 heures du matin. Dans mon reportage de «France-Soir», je m'étais permis d'écrire: «Il est toujours triste d'être obligé d'avoir honte d'un grand écrivain.»

L'après-midi de ce mardi 4 juillet, je suis allé interviewer, dans un hôtel parisien, Karen Blixen, qui, dans son grand âge, ressemblait à la momie de Ramsès II.

Céline est mort à Meudon le 1er juillet. Le 2, à Ketchum (Idaho), Ernest Hemingway mettait fin à ses jours. Une semaine après avoir assuré le reportage de l'enterrement de Céline, j'étais à Pampelune en train d'enregistrer pour la radio une messe que le matador Antonio Ordoñez faisait célébrer, dans la chapelle San Fermin de l'église San Lorenzo, à la mémoire de son célèbre afcionado. Orson Welles était là, ainsi que quelques vedettes du cinéma et de la littérature qui semblaient s'être donné le mot pour se retrouver à la Feria de Pampelune, en souvenir d'Ernesto.

Roger Grenier.
(c) "le Nouvel Observateur" du 19 mai 2011.

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lundi 22 juillet 2019

Gabriel Casas (1892-1973)





(c) Gabriel Casas
Gabriel Casas, l'un des photographes espagnols les plus importants de la période entre les deux guerres, a été l'un des premiers à adopter le langage photographique du New Vision, le mouvement d'origine allemande qui a révolutionné la photographie avec l'usage de cadres surprenants, contrastes de lumière et de formes, photomontages...

dimanche 21 juillet 2019

Bientôt dans les bacs...


Des freaks, des rednecks, des paumés, et ce Sud qui sert de miroir à une Amérique tiraillée entre violence et respectabilité, peuplent tous les grands romans de Harry Crews.
Ce portrait noir et grotesque de son pays, Crews le dresse plus nettement encore quand il s’essaie au journalisme. On est alors du côté du « nouveau journalisme » de Tom Wolfe, ou du « journalisme Gonzo » de Hunter S. Thompson, de la « narrative non-fiction » comme on dit en français. Cette partie de l’œuvre de Harry Crews était jusqu’à aujourd’hui totalement inconnue en France, alors qu’il a publié, dans les années soixante-dix, de très nombreux textes dans la presse.
Péquenots rassemble ses reportages parus dans Esquire et dans Playboy entre 1974 et 1977. Qu’il nous entraîne dans sa quête d’une vasectomie, dans l’univers des forains, sur un sentier de randonnée des Appalaches, ou encore sur un tournage en compagnie de Charles Bronson, Harry Crews fait toujours mouche : il nous bouscule ou nous arrache un sourire. Souvent les deux.

Péquenots, Harry Crews, Editions Finitude, À paraître le 3 octobre 2019!

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samedi 20 juillet 2019

Mieux vaut lire ça...


"Céline m’emmerde. Profondément et à jamais. Rien à voir avec le débat aussi répétitif que vain sur L’homme/L’écrivain, la Collaboration, l’antisémitisme et tout ça. Céline m’emmerde – gravement – parce que ses livres m’emmerdent.
D’un écrivain et de ses livres, j’attends d’abord – au-delà de l’étonnement, du plaisir, du divertissement, de la réflexion, bref des affects immédiats de lecteur – fondamentalement deux dimensions essentielles à mes yeux : l’universalité et le style. Avec Céline je n’ai ni l’un ni l’autre.
Quel que soit le sujet que Céline aborde, la guerre, l’humanité, les femmes, la modernité, l’amour, il ne nous sert toujours que la même soupe : ses symptômes, son moi, sa haine de l’existence, sa vision du monde, son bric-à-brac aussi pitoyable que grotesque. En gros, Céline n’a d’autre préoccupation que Céline et c’est terriblement ennuyeux parce que les préoccupations de Céline sont tristes (Spinoza aurait parlé de passions tristes), étriquées, rabougries, égocentriques et surtout obsessionnelles. Où est le souffle de l’humanité dans n’importe laquelle de ses œuvres ? On répond Le « Voyage » ? Pas besoin d’attendre le naufrage littéraire des œuvres ultérieures, c’est déjà un sinistre pamphlet : contre la modernité, contre les hommes, contre l’organisation sociale, contre, contre, contre. Jamais pour et c’est là qu’on atteint la première limite insupportable de Céline : on ne trouve trace dans son œuvre d’aucune forme d’engagement positif."...

A lire...

...que d'être aveugle !
Quoique... J'espère que son écrivain préféré n'est pas Marc Levy!
Les mêmes arguments peuvent être utilisés pour justifier pourquoi je l'aime le Céline...
Pour moi, l'un des derniers grands atrabilaires avec Léon Bloy et Paul Léautaud...

jeudi 18 juillet 2019

Le Feu - Henri Barbusse

Présentation de l’éditeur
Les années 1915 et 1916 ont marqué, pour Henri Barbusse, des dates décisives. C’est en 1915 qu’il a vécu Le Feu dans les tranchées du Soissonnais, de l’Argonne et de l’Artois, comme soldat d’escouade, puis comme brancardier au 231e régiment d’infanterie où à s’était engagé. C’est en 1916, au cours de son évacuation dans les hôpitaux, qu’il a écrit son livre. Celui-ci, publié par les Editions Flammarion à la fin de novembre, remportera aussitôt après le prix Goncourt. Le Feu est considéré depuis près de trois quarts de siècle dans le monde entier comme un des chefs-d’oeuvre de la littérature de guerre, un des témoignages les plus vrais et les plus pathétiques des combattants de première ligne. Témoignage impérissable aussi : Le Feu, traduit dans la plupart des langues, continue de susciter chez les jeunes un immense intérêt. Le Feu est suivi du Carnet de guerre qui permet de remonter aux sources mêmes de la création du roman épique d’Henri Barbusse.

Ce journal d’une escouade est une chronique de la guerre de 14-18 à travers le quotidien des poilus « dans leur jus » avec leurs argots, leurs accents et leurs expressions d’époque. C’est un documentaire (à peine romancé) qui dénonce toute l’horreur de la guerre et son absolu inutilité sans rien nous épargner. Jamais la guerre n’a été aussi bien retranscrit ; oubliez les films sur le sujet, ce sont des contes pour enfant à côté de ce livre (…soldat Ryan ; un oui-oui à la campagne). Les critiques de l'époque ont d'ailleurs qualifié ironiquement Barbusse de "Zola des tranchées".
C'est un texte à déchirer le cœur ; on ressent bien l’atmosphère pesante, la pluie quotidienne,  l’humidité qui règne en permanence dans les tranchées, la boue, la fumée des bombardements qui recouvre tout comme une chape de plomb. L’Homme ne ressemble plus à un homme... L’Humanité touche le fond... Quant on pense qu’ils ont remis ça en 39-45! Maintenant ce ne sont plus que des noms sur des plaques... (cf Hyvernaud) C’est l’horreur absolue... C’est renforcé par le fait que tous les détails de la vie quotidienne sont là, rien n’est oublié, rendant les scènes d’un réalisme presque clinique...
Henri Barbusse n’a pas révolutionné le style mais il a un pouvoir d’évocation extraordinaire. Et il sait à merveille retranscrire l'oralité ; comme, par exemple, le parler des gens de Ch'Nord! Un Chef-d’œuvre qui mérite amplement son prix Goncourt 1916. Pourquoi n’étudions-nous pas plus ce livre à l’école ? au lieu de nous gaver de livres d'histoire ! 
Attention, cependant, l’argot et les longues scènes de description peuvent en rebuter plus d’un.

« Les jeux des enfants sont de graves occupations. Il n’y a que les grandes personnes qui jouent. » p.111

« Ah ! mon vieux, ruminait notre camarade, tous ces mecs qui baguenaudent et qui papelardent là-dedans, astiqués, avec des kébrocs et des paletots d’officiers, des bottines – qui marquent mal, quoi – et qui mangent du fin, s’mettent, quand ça veut, un cintième de casse-pattes dans l’cornet, s’lavent plutôt deux fois qu’une, vont à la messe, n’défument pas et l’soir s’empaillent dans la plume en lisant sur le journal. Et ça dira, après : «J’suis t’été à la guerre.» » p.133

« Oui, oui. Alors c’est trop facile de dire : « Faisons pas d’différence entre les dangers ! » Minute. Depuis le commencement, y en a quelques-uns d’eux autres qui ont été tués par un malheureux hasard : de nous, y en a qué’qu’s-uns qui vivent encore, par un hasard heureux. C’est pas pareil, ça, vu qu’quand on est mort c’est pour longtemps. » p.148

« Quand y a la guerre, on doit risquer sa peau. » p.149

« Labri, vague berger […] est couché en rond sur une toute petite litière de poussière de paille. […] Bécuwe s’approche et, avec sont accent chantant des environs de Lille : 
– Il minge pas s’pâtée. Il va pas, ch’tiot kien. Eh ! Labri, qu’ch’ qu’to as ? V’là tin pain, tin viande. R’vêt’ cha. Cha est bon, deslo qu’est dans t’ tubin… I’ s’ennuie, i’souffre. Un d’ ch’ matin, on l’r’trouvera, ilo, crévé. » p.159

« A la guerre, la vie, comme la mort, vous sépare sans même q’on ait le temps d’y penser. » p.304

«[…] j’ai oublié […] ma souffrance de la guerre. On est des machines à oublier. Les hommes, c’est des choses qui pensent un peu, et qui, surtout, oublient. Voilà ce qu’on est. » p.359

« — Les hommes sont faits pour être des maris, des pères – des hommes, quoi ! – pas des bêtes qui se traquent, s’égorgent et s’empestent.  
— Et tout partout, partout, c’est des bêtes, des bêtes féroces ou des bêtes écrasées. Regarde, regarde ! » p.360

« — Deux armées qui se battent, c’est comme une grande armée qui se suicide ! » p.361

« — Tout de même, qu’est-ce que nous sommes depuis deux ans ? De pauvres malheureux incroyables, mais aussi des sauvages, des brutes, des bandits, des salauds. » p.361

Henri Barbusse, Le Feu, Editions  LGF/Livre de poche - 412 pages

mardi 16 juillet 2019

Bientôt dans les bacs...


Une anthologie de poèmes inédits parus dans d’obscurs magazines, conservés dans des bibliothèques et collections privées.
Profonde, rythmée, transgressive, hilarante, vernaculaire, la poésie de Bukowski est à l’image de son auteur : aux antipodes de la littérature académique.

Tempête pour les morts et les vivants, Charles Bukowski, Editions Au Diable Vauvert, À paraître le 29 août 2019 !

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dimanche 14 juillet 2019

Comment être heureux - Arthur Schopenhauer

Présentation de l’éditeur
Personnage ombrageux, taciturne et pessimiste, Arthur Schopenhauer est cependant l'auteur d'une oeuvre qui défend l'épanouissement et le génie de l'individu contre les maux de la société. Dans un monde où les hommes oscillent entre "l'ennui et la douleur", le chemin de la félicité ne semble pas tracé d'avance... La voie qui se dessine au gré des textes rassemblés dans ce recueil est celle d'un état de neutralité qui permettrait de s'affranchir de la souffrance et de vivre avec les coups du sort. Tour à tour satiriques, mordantes et revigorantes, ces réflexions pragmatiques sont issues des Aphorismes sur la sagesse dans la vie.
Arthur Schopenhauer (1788-1860) Philosophe allemand du début du siècle, il pose les fondements de sa doctrine dès 1819 dans Le Monde comme volonté et comme représentation. Ce solitaire incompris n'accède à la renommée qu'à la fin de sa vie et devient une figure majeure de la philosophie allemande, influençant notamment Friedrich Nietzsche et Sigmund Freud.

Gentille entrée en matière à la philosophie de Schopenhauer (Schop’Schop’ pour les intimes), ces extraits de “Aphorismes sur la sagesse dans la vie”, véritable reader's digest (cf Céline), se laissent lire assez facilement même si parfois il faut un peu s’accrocher. Et quand on sent que l’on va un peu décrocher, Schopenhauer nous donne un exemple concret, ce qui nous remet sur la route au lieu de nous laisser au bord du chemin ; ce qui est plutôt bien vu! Mais j'aurais aimé certains extraits plus longs.
Le titre est à prendre avec ironie ; la recherche du bonheur chez Schopenhauer, si j'ai bien tout compris, est la recherche du non-malheur, fuir tout ce qui peut nous rendre malheureux, fuir les bonheurs factices...
J’ai découvert ainsi que j’étais plus “schopenhauerien“ que “bon à rien”, c'est rassurant ; en tout cas, j’ai beaucoup de points communs...
Je l’ai d’ailleurs offert à ma mère, qui, à 70 ans et mèche, cherche encore après (le bonheur) ; ça lui fera les pieds... ;D
Reste à me procurer et à lire la version complète...

vendredi 12 juillet 2019

Déjà dans les bacs...


Le roman inédit le plus déjanté et le plus pop d’Harry Crews.

Après avoir vagabondé à travers les États-Unis, John Kaimon arrive en Floride, où il fait la connaissance d’une petite communauté de karatékas fanatiques. Ceux-ci exercent leur art dans la piscine vide du motel désaffecté où ils ont élu résidence. Plus qu’un simple art martial, c’est un véritable culte auquel s’adonne cette tribu, dont chaque membre a renoncé à sa vie passée ainsi qu’à toute possession matérielle. Seule compte pour eux la pureté de l’esprit. Si Kaimon y trouve d’abord une philosophie de vie satisfaisante, son attirance pour Gaye, une magnifique karateka, va bientôt l’entraîner dans de sulfureuses aventures.  Car si l’esprit se doit d’être fort, la chair est parfois bien faible…

Publié en 1971, Le karaté est un état d’esprit est le quatrième roman d’Harry Crews. On retrouve dans ce récit irrésistible, plein de compassion et d’ironie, les obsessions de l’auteur pour la sexualité carnivore, les freaks, la violence, mais aussi toute sa tendresse pour les âmes perdues qui tentent de survivre dans une société qui leur est contraire.

Harry CrewsLe karaté est un état d’esprit, Editions Sonatine.

Source
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jeudi 11 juillet 2019

Qu'est-ce que c'est que l'écriture ? - William S. Burroughs


1976 * Entretien avec William Burroughs, l’écrivain évoque le 'cut-up', technique littéraire mise au point avec son ami l’artiste et poète Brion Gysin, consistant au découpage et réagencement aléatoire de textes préexistants pour produire un texte nouveau.

mercredi 10 juillet 2019

Déjà dans les bacs...


Grand entretien à Rome avec Dario Argento. Dialogues avec Bertrand Bonello, Yann Gonzalez, Jean-Baptiste Thoret, Bruno Forzani. Analyses, une BD, des photos exclusives et inédites. Un objet collector de 132 pages, une référence pour tous les admirateurs du maître italien. 8 euros.


Dario Argento
Inferno
Ténèbres
Opéra
Profondo Rosso (Les frissons de l'angoisse)
Suspiria : Dario Argento, Luciano Tovoli & Joan Bennett.

mardi 9 juillet 2019

Poésie Fortuite #1

Sur une idée originale du génial Roland Moreno, inventeur de la carte à puce et véritable Géo Trouvetou, “Le Radoteur” recycle la théorie de l’information chère à Shannon, pour générer des nouveaux mots à l’aide d’un "vivier" de départ...


Extrait du Livre "Théorie du Bordel Ambiant"  (c)Roland Moreno :

Principe de fonctionnement

Le célèbre théoricien Claude Shannon travailla sur une Théorie des sources d’informations. Théorie autonome et complète des systèmes de transmission et de traitement du signal qui détermine combien il faut prélever d’échantillons dans un signal périodique, quel qu’il soit, pour garantir une certaine bande passante. Il trouva quelques règles établissant un degré minimal de cohérence entre sources d’informations et données.
Voici à travers un exemple, l’application de cette loi à la linguistique.

SOIENT CINQUANTE MOTS D’ANGLAIS PRIS AU HASARD, SHANNON POSTULE L’EXISTENCE D’UNE LOI DE COMPOSITION DE CE SOUS-ENSEMBLE DE LA LANGUE, NON NEUTRE, ENTIÈREMENT DÉTERMINÉ, ET VA S’ATTACHER À DEMONTRER LA RIGUEUR DE CETTE LOI.

Commençons par un espace, précédant un mot choisi au hasard, (PRIS par exemple) de la suite de mots à analyser.
1) Avançons d’une position pour lire le P que l’on mémorise.
2) Parcourons maintenant en boucle, le reste de la phrase, lettre par lettre, pour trouver la
première position d’une lettre identique. (Nous repérons P de POSTULE)
3) Si une lettre correspondante est trouvée, cette lettre est le premier caractère émis par la source.
Réitération de la phase 1 (O de postule)
Répétition de la phase 2 (pour trouver O de LOI)
Répétition de la phase 3
Si on répète ce cycle, on trouve successivement POITRENNE le cycle s’arrête alors par la rencontre d’un caractère de fin de mot (espace ou tout signe de ponctuation).
Cette suite de lettres ressemble d’une certaine façon au style général de la chaîne de départ bien que POITRENNE n’existe probablement pas.

Roland MORENO utilisa cet algorithme pendant de nombreuses années pour vendre à des cabinets
publicitaires des noms de parfums, de shampoing ou autre. À partir d’une série de mots qualifiant les propriétés que doit évoquer le nom du produit, il faisait tourner son programme sur son Apple II qui alignait inlassablement des centaines de mots nouveaux.

Il travailla à l’amélioration du système et décrivit son travail dans « Théorie du Bordel Ambiant »

"L’explication tient au caractère probable, ou improbable, de la présence de tel ou tel doublet :
PO par exemple apparaît deux fois (postule composition) ;
OI, de son côté, apparaît trois fois dans la source ;
Quand à IT il n’apparaît qu’une fois, mais une fois quand même ;
Au contraire, PA n'apparaît pas une seule fois, et la probabilité est donc nulle de le voir produit par la source.
Au total, chaque lettre émise par la source apparaît nécessairement dans une position conforme à la
distribution caractérisant la source : le 0 vient après un P, mais avant un i, soit finalement :
PO (2)... OI (2) ... IT (1)... TR (2)... RE (3)... EN (5)... NE (2).
Les couples émis par la source sont donc en toute certitude présents dans la chaîne initiale, dans cet ordre exact, et ce au moins une fois. Ce trait caractérise également les débuts et fins de mots, aucune série ne pourra comprendre un M comme finale, puisque la source ne comprend aucun mot se terminant par m, Pour exactement la même raison, aucune série ne pourra avoir J comme initiale.
(...)
Je continuai finalement de façon plus ou moins hobbyiste, jusqu’à l'amélioration du système, que je
commençai alors à désigner sous le nom de Radoteur (en raison de son infernale propension à se répéter lui-même).
(...)
Le Radoteur tel qu'il se présente aujourd'hui va beaucoup plus loin que la rotation toute simplette de l'anneau originel. Un des équipements les moins créatifs dont je l'ai depuis rehaussé est un filtre anti-radotage, lui interdisant de faire semblant d'avoir trouvé quelque chose, lorsque en réalité le mot produit a déjà été créé au cours de la même session (ou, bien même existe depuis le tout-tout début, tel quel, dans la liste-source). Dès que le système produit un mot, il le conserve en mémoire et vérifie, avant toute nouvelle proclamation, qu'il n'y a identité avec aucun mot déjà enregistré. (Sa mémoire est donc composée de deux sections : liste-source + fichier des mots fabriqués.)
(...)
Le seuil, de son côté, institue la notion de cadrage variable. Là où n'étaient considérés à l'origine que des doublets, sont désormais prises en compte une infinité de combinaisons possibles. Non seulement une lettre en avant-une lettre en arrière (1.1), mais aussi deux en avant, une en arrière (2.1), et ainsi de suite : 3.1, 4.1, 2.2, 3.2, etc.
La fonction 1.1 est donc remplacée par x.y, c'est-à-dire que des constantes deviennent des variables.
Ce mécanisme est ici, tout de suite, très séduisant : les mots deviennent beaux ! Et encore plus ressemblants qu'avant !
L’effets de la variation de la valeur du seuil est le suivant : plus le cadrage est « large »
(somme X + Y), plus le Radoteur a du mal à produire des mots nouveaux, puisque ceux-ci comprendront des suites de lettres de plus en plus longues (3 + 2 = 5 lettres, par exemple) obligatoirement déjà présentes, par principe, dans la liste-source.
Mais, en contrepartie de la capacité de production ainsi amoindrie, le Radoteur fournit des mots de plus en plus fidèles à la liste-source (véritable langue d'origine) et donc bien plus facilement prononçables. (...)"

Roland Moreno
Source

Ici, le principe a été étendu à la phrase, et après quelques heures de programmation, et avec l’aide des chaînes de Markov, un "Radoteur Markovien" en quelques sortes, et en se limitant au cadrage : 2 mots pour en donner 1 pertinent…
Reste un boulot de préparation des différentes sources, de tri, de "mise en forme" minimaliste...
Et reste aux lecteurs à trouver le sens...

Mixe de deux sources : Le Spleen de Paris & Les fleurs du mal  (c) Baudelaire.
Premiers essais... (reste quelques coups de tournevis à mettre). L'avantage c'est que l'on peut en générer à l'infini (et au-délà) !!!

Du temps que Lesbos se lamente
Et malgré bien des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le versant de ses aides.
Car je ne puis trouver parmi ces pâles roses
Une fleur moisie
Moi je pensai tout de suite
Il faut être toujours ivre!
Loin des pioches et des ifs flamboyants
Dans les doigts lutins perles de la femme
Au corps divin promettant
Le bonheur est marié au silence
Où la mélancolie à midi
Quand tout frais il se lève
Comme une horrible et chère relique.
Si tu veux chercher un fiancé stupide
Cours offrir un cœur qui regorge de vieux airs inconnus et pauvres
Que vous leur avez donné
Ayant appris à mêler
Le salpêtre et le couteau.
Prière gloire et louage à toi satan
Dans les ruisseaux et les extases
Pour dire les plus indolents et les princes
Je crois toujours que cet être m’inspirait
Me débarrasser de cet incomparable privilège
Qu’il peut à sa pâleur habituelle
Comme la jeunesse
Sous la coupole spleenétique du ciel
Et les vastes éclairs de son cœur à l’ouvrage
L’art est long.
Montrant leurs seins pendants et leurs robes ouvertes
Des femmes dont l’œil par sa misère
Et ajouter les trivialités de sa cage
Et de vins de parfums de liqueurs qui feraient délirer les cerveaux
Et les agiter avec ma volonté de tirer un souris de ce flot d’anathèmes
Qui monte tous les hôpitaux
Et dans la fange et du recueillement
Mais je les entendis rire
Et chuchoter entre eux
Où des princesses sautaient et cabriolaient sous le personnage de chacun.
Plongez au plus noir de la beauce
Je crois toujours que cet être doué de tant de plaisir plus doux
Au détour d’un sentier
Une charogne infâme sur un lit hasardeux.
Lion des peuples furieux soyez béni
Mon dieu qui donnez la souffrance
Comme un damné descendant sans lampe
Au bord de votre âme mondaine
Des sons d’orgue mourant
Et de noirs bataillons de larves
Qui coulaient comme un départ.
Plus belle que vénus se dressant sur le front
N’ont qu’un espoir étrange et fatal dégoûtant Phénix fils
Et le désir balance
Mais on voit un trône splendide
Le poète se dit rêveur devant ces voyageurs
Pour lesquels est ouvert
L’empire familier des ténèbres futures.
Les houles en roulant les images des cieux spirituels
L’inaccessible azur pour l’homme terrassé
Qui rêve encore et ne daignait rien voir.
Presque tous nos malheurs nous viennent
Et dont le flanc toujours vierge et drapé de guenilles
Sous l’éternel labeur
N’a jamais de fin.
Et ils s’enfuiront
Comme font les offusqués
Fiers mignons
Malgré l’art des poudres et du jour.
Maudites soient vos cibles et vos frimas
Et saurai-je tirer de l’implacable hiver
Des plaisirs clandestins
Je vois l’heure
Il est trop tard.
Je m’avance à l’attaque
Et je m’étais confiné dans ma froide épouvante
Et quand je contemple d’en haut le globe en sa verve puissante
Concevait chaque jour en bénissant sa flèche.
Ange plein de taches de rousseur à sa bouche
Ils mêlent de la joie et de bleu mystique
Nous échangerons un éclair
Puis la vapeur se fit plus bleue et froide de décembre
Je la reconnaissais pour l’avoir caressée une fois sa vendange
Vivre est un art
Et celui-là me dit
Voilà qui est joli comme une toile
Vos souvenirs avec leurs cadres d’horizons.
Je ne puis malgré tout mon être
Colère haine frissons horreur labeur dur
Et cupide esclave de l’esclave
Et ruisseau dans l’égout
Le bourreau qui jouit
Le martyr qui sanglote
La fête de la plus douce
La plus belle eau
Sonnets de maître Belleau
Par tes galants mis aux fers
Sans cesse il faut qu’il désespère d’avoir sa croix et l’esprit
Le Welche dit
Tout ça pour moi c’est du prâcrit
Je ne puis mégère libertine pour briser ton courage.
Parfois il parle et dit
Je t’aime
Quand ton cœur dans l’horreur
Se noie.
Ces jeux
Ces cliquetis du fer
Sont les corbillards de mes amours décomposés. 
Ce gouffre
C’est l’enfer de ton regard
D’une vapeur couvert ton œil mystérieux
Est-il bleu gris ou vert ?
Disait-elle aussitôt
Est-ce que par hasard la joie du riche au fond de l’œil du connaisseur ?
Devine une peinture idéale
Sous un soleil automnal
Ô ma chère vous me rendez l’azur du ciel dont j’étais enveloppé
Le souvenir enivrant qui voltige dans l’air doux du matin
Onduleuse embaumée.

DJ Baudelaire 2.0  (c) Le Radoteur Markovien